Conférence de Michele Gazzola (Université d'Ulster et Université d‘Ottawa)
La politique linguistique des organisations internationales peut avoir différents effets allocatifs et distributifs qui doivent être évalués. Le choix des langues officielles d’un office des brevets, par exemple, peut créer des inégalités entre les coûts supportés par les inventeurs pour accéder à la protection de la propriété intellectuelle ; la politique de traduction peut influer sur la distribution et la diffusion de l’information en matière de brevets parmi les inventeurs ; enfin, la politique linguistique peut influer sur les résultats des innovations et la compétitivité internationale des entreprises. Malgré cela, le rôle du plurilinguisme dans les politiques de protection de la propriété intellectuelle est resté relativement peu exploré dans la littérature et peu de tentatives systématiques ont été faites pour caractériser (et encore moins pour évaluer) les politiques linguistiques des organisations de propriété intellectuelle comme ayant la possibilité d’affecter l’efficacité des processus d’innovation et de générer des gagnants et des perdants.
Cette présentation a abordé la question des effets allocatifs et distributifs de la politique linguistique dans les organisations de propriété intellectuelle en général, puis a examiné le cas de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI), qui fait partie du système des Nations Unies, et de l'Office européen des brevets (OEB). Ces deux organisations fournissent un contexte approprié pour des analyses comparatives. Le Traité de coopération en matière de brevets (PCT), administré par l’OMPI, compte dix langues officielles (ou « langues de publication »), à savoir l’allemand, l’anglais, l’arabe, le chinois, le coréen, l’espagnol, le français, le japonais, le portugais, et le russe. Le régime linguistique de l’OEB ne comprend que trois langues officielles, à savoir l'anglais, le français et l’allemand. Une comparaison entre différentes politiques linguistiques montre dans quelles conditions davantage de plurilinguisme peut être à la fois plus rentable et plus équitable que le monolinguisme.