Compter les morts? Une analyse de la mortalité excédentaire récente en temps de pandémie

Plusieurs pays publient maintenant depuis plusieurs semaines le nombre total de décès hebdomadaires et mensuels en plus des décès identifiés comme étant dus à la COVID-19. Le New York Times met à jour quotidiennement un tableau de bord pour plusieurs pays. Le besoin de cette statistique n’est pas un caprice des chercheurs et statisticiens qui se penchent sur la question, mais bel et bien une nécessité pour comprendre la situation. Dans un article récent du Lancet, un groupe d’auteurs soulignait l’urgence de mettre en place un système de statistiques permettant de faire le suivi de la mortalité excédentaire totale, c’est-à-dire la mortalité qui excède celle qui serait attendue en temps normal, peu importe la cause. D’abord, se comparer entre juridictions est difficile si on regarde le nombre de décès liés à la COVID-19 puisque ce nombre varie selon les pratiques d’identification et de classification des causes de décès. Ensuite, parce qu’une pandémie de l’ampleur de la COVID-19 peut mener à des décès qui ne sont pas dus au virus – des décès indirects. Par exemple, certaines personnes pourraient retarder une visite à l’urgence. D’autres pourraient voir leur chirurgie retardée parce qu’une priorité aurait été donnée aux cas de COVID-19 et que les médecins sont occupés à d’autres tâches, par exemple en centre d’hébergement et de soins de longue durée. Ainsi, une mesure ultime d’impact de la pandémie est le nombre de décès total.

Par rapport à nombre d’autres juridictions européennes ou américaines, le Québec fait piètre figure en ce qui a trait à la publication de chiffres récents sur la mortalité. Sur le site de l’Institut de la statistique du Québec (ISQ), on peut obtenir les décès mensuels jusqu’à février 2020. Plusieurs chercheurs ont souligné cette problématique dans les médias. Le 15 mai 2020, un article de La Presse par Tristan Péloquin se basant sur les données du registre de l’état civil fait état de 6349 décès en mars et de 7662 en avril. En utilisant ces données imparfaites, auxquelles il y aura certainement des ajustements à faire, nous avons tenté de faire rapidement un exercice permettant de mieux cerner la mortalité excédentaire préliminaire.

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